Lorsque la justice ordonne une saisie à caractère pénal, toute manipulation de ce bien n’est pas jugée selon les règles habituelles du droit des créances. C’est ce qu’a rappelé la chambre criminelle de la Cour de cassation dans une décision rendue le 25 juin 2025, soulignant une distinction essentielle entre les différents types de saisies.

Deux incriminations, deux logiques

L’article 314-6 du Code pénal vise le détournement ou la destruction d’un bien saisi en garantie des droits d’un créancier. Cette infraction ne s’applique pas aux saisies pénales, qui ont pour but d’assurer l’exécution d’une peine. Dans l’affaire jugée, une société, bien qu’informée de la saisie de plus de 698 000 euros ordonnée dans le cadre d’une procédure pénale, a laissé son gérant effectuer plusieurs virements, réduisant considérablement la somme bloquée. Les juges du fond ont initialement estimé que l’infraction prévue à l’article 314-6 était applicable.

Erreur d’interprétation de la cour d’appel

La Cour d’appel de Paris a confirmé la condamnation du gérant, estimant que la saisie, bien que pénale, entrait dans le champ de l’article 314-6. Elle justifiait sa décision par la finalité de la mesure : préparer une éventuelle confiscation en lien avec des infractions commerciales. Pour la cour, la nature pénale de la saisie ne modifiait pas le régime juridique applicable.

Le rappel de la règle par la Cour de cassation

La chambre criminelle a censuré cette analyse. En vertu des articles 111-4 et 314-6 du Code pénal, une interprétation stricte s’impose : ce texte ne vise que les saisies civiles, excluant expressément les saisies pénales. Dans ces cas-là, seul l’article 434-22 du Code pénal s’applique. Il punit de deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende le détournement d’un objet placé sous main de justice.
 
Cet arrêt apporte une clarification bienvenue sur les régimes juridiques applicables aux détournements d’objets saisis. Il réaffirme le principe fondamental de l’interprétation stricte du droit pénal et rappelle aux juridictions qu’en matière de saisies, l’intention du législateur doit primer sur les finalités perçues des mesures ordonnées.
 
Cass. crim., 25 juin 2025, n° 24-82.463, B